Heureusement
Depuis la naissance de notre fils, nous n'évoquons pas nos filles décédées devant notre aînée. Nous redoutons de compliquer les choses, et nous voulons laisser sa place à l'émerveillement, à la petite étincelle de fierté qui brille dans ses yeux lorsqu'elle assume pleinement son rôle de grande soeur. Nous lui avons juste glissé, rapidement, qu'elle était déjà grande soeur avant, même si ce n'était pas tout à fait pareil.
A part ça, nous ne lui avons pas demandé si elle voulait aller au cimetière (il faut dire aussi que nous avons nous-même peu de temps pour y aller... et j'effectue expressément des détours pour pouvoir m'y arrêter), et nous la laissons au maximum vivre dans son insouciance d'enfant.
Mais a-t-elle toujours cette insouciance ? N'a-t-elle pas perdu, comme nous, un peu de la naïveté qui améliore subtilement la vie de tous les jours ?
Hier matin, nous étions dans le canapé, elle était à côté de moi, la main posée sur son petit frère, lui même endormi sur mes genoux. Et, tout simplement, en nommant ses deux soeurs, elle m'a dit "Heureusement qu'il n'est pas mort, comme petite soeur 1 et petite soeur 2".
Oui, heureusement...