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pas tout à fait papa
13 février 2015

Réponse du maire...

J'ai reçu une réponse du maire de mon village, suite au courrier que je lui avais adressé quant à l'absence de mes filles nées sans vie en page des états civils des bulletins municipaux. La voici (nous l'avons reçue imprimée sur un joli papier à entête) :

 

"Madame, Monsieur,

J'ai bien pris connaissance de votre courrier du 29 janvier 2015 concernant vos deux petites filles.

J'ai l'honneur de vous informer que l'état civil figurant dans le bulletin municipal est le reflet du registre de l'état civil de la commune. Ce dernier reprend les actes établis proprement dits par la commune de BETE-ET-MECHANT-les-BAINS et la transcription des actes reçus d'autres communes pour les personnes domiciliées sur la commune de BETE-ET-MECHANT-les-BAINS.

Or, pour vos deux petites filles, la commune de BETE-ET-MECHANT-les-BAINS n'a reçu aucun acte. De ce fait, elles ne figurent pas dans les registres de la commune et donc pas dans le bulletin.

Espérant avoir apporté une réponse à votre demande, je vous prie d'agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le Maire, X"

 

A cela s'ajoutait, écrit à la main, "Avec ma très sincère considération, -signature-"

 

Voilà. Qu'en penser ? Pas grand chose de bon... Pour re-situer précisément la situation, notre village compte, au recensement de 2012, 455 habitants. C'est peu. Suffisamment peu pour espérer que le relationnel, l'humain, passe un peu au delà de l'administratif bête et méchant. Mais c'était oublier que notre village pourrait aussi bien s'appeler "Bête-et-Méchant-les-Bains". Nous avons demandé à notre maire, à chaque fois, l'autorisation d'enterrer nos filles dans le cimetière du village. Ils sont donc bel et bien au courant de leur naissance sans vie. Mais comme ils n'ont pas reçu d'acte, ils ne mettent pas nos filles sur le bulletin municipal. C'est comme ça que ça s'est passé.

Mais ce n'était pas l'objet de notre courrier.

Nous parlions d'avenir. Monsieur le Maire nous répond au passé.

Nous parlions de sentiments, d'humain, de respect. Monsieur le Maire nous parle d'administration.

Soit dit en passant, je remarque aussi qu'il considère comme un honneur de nous tenir ces explications administratives. Il n'y a aucun honneur à ça. L'honneur aurait été de comprendre notre courrier, d'expliquer, peut-être, que d'un point de vue législatif, il n'avait pas la possibilité de reporter les prénoms de nos filles sur ces bulletins municipaux, et qu'il le regrette au vu de notre réaction. L'honneur aurait pu être, aussi, d'indiquer sur une page à part, n'importe où dans ce bulletin en dehors de cette page d'états civils, que des habitants de la commune avaient donné naissance à des enfants privés de vie. L'honneur aurait été de comprendre notre déception, et de se remettre un peu en question.

Notre courrier était apaisé. Sans colère. Sans reproche. C'était une requête, même pas pour nous, mais pour de futurs parents d'enfants nés sans vie.

Je regrette d'avoir tourné ce courrier de la sorte. J'aurais dû cracher ma déception, cracher ma douleur et mon indignation face à l'absence de mes filles dans ces bulletins. J'aurais dû peut-être être insultant. Utiliser des phrases choc. Leur transmettre les photos de mes filles, peut-être, pour qu'ils comprennent en voyant leur corps sans vie que ce sont bien des enfants que mon épouse a mis au monde. Alors, peut-être, Monsieur le Maire n'aurait pas osé me répondre du haut de ses formules administratives, caché derrière son registre d'état civil communal.

Mais je suis passé au delà de ça. J'ai voulu comprendre, et pardonner. J'ai voulu aller de l'avant. J'ai voulu épargner à d'autres ce dont on ne nous a pas épargnés, en passant par la douceur et la sagesse. Je n'ai reçu que de l'incompréhension. On ne m'y reprendra plus.

Je pense renvoyer à Monsieur le Maire les actes d'enfant sans vie de mes filles. Comme ça, il pourra les ranger dans un coin, proche de son registre d'état civil si bien ordonné et si bien administrativement géré. 

Pourquoi faut-il toujours s'ennerver, crier, hurler, choquer, pour se faire comprendre ?... Nous aurions tant besoin d'appaisement, de compréhension silencieuse...

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pas tout à fait papa
  • Je suis un papa qui souhaite, dans l'anonymat, parler du deuil de mes deux enfants nés sans vie. Si vous voulez partager certains de mes articles ou l'adresse du blog, je vous demande de me prévenir et d'attendre mon accord, afin de préserver cet anonymat
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